Le licenciement pour faute grave est une mesure lourde, réservée aux comportements rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Mais qu’en est-il lorsque ces comportements, aussi inappropriés soient-ils, trouvent leur origine dans des conditions de travail dégradées ?
C’est à cette question que la Cour d’appel de Lyon a récemment apporté une réponse nuancée.
Dans cette affaire, un salarié avait tenu des propos offensants à l’égard de plusieurs membres de l’entreprise : « Gros con » pour qualifier son directeur technique, ou « Grand dadais » et « branleurs de la rectif » pour désigner certains collègues, et avait ralentit volontaire de son rythme de travail.
L’employeur engage alors une procédure de licenciement pour faute grave, considérant ces agissements comme incompatibles avec le maintien du salarié dans l’entreprise.
La Cour d’appel de Lyon, dans un arrêt du 21 mars 2025 (n° 22/02424), rejette la qualification de faute grave. Elle rappelle que la faute doit être appréciée en tenant compte du contexte dans lequel elle est commise.
Le salarié effectuait des heures supplémentaires non payées,
Les durées maximales de travail n’étaient pas respectées,
Autrement dit, l’attitude du salarié, bien que répréhensible, s’inscrivait dans un climat de tension lié au non-respect des obligations légales par l’employeur.
Le comportement du salarié est qualifié de fautif, mais pas suffisamment grave pour justifier un licenciement immédiat sans indemnités. En clair, le licenciement pour faute grave est requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec les conséquences indemnitaires que cela suppose.
Cette décision illustre parfaitement la tendance actuelle des juridictions à recontextualiser les faits fautifs, en appréciant la part de responsabilité de l’employeur dans la dégradation de la relation de travail.
La question reste posée : la Cour de cassation validera-t-elle cette analyse ?
En cas de pourvoi, l’enjeu sera de déterminer jusqu’où peut aller la tolérance des employeurs face à des comportements inacceptables, lorsqu’ils résultent d’une altération des conditions de travail.
Cette décision de la Cour d’appel de Lyon rappelle l’importance pour l’employeur de respecter scrupuleusement ses obligations avant d’engager toute procédure disciplinaire.
CA Lyon, ch. sociale B, 21 mars 2025, n° 22/02424
Maître Ricard, avocate à Toulouse et dans les villes voisines de Balma et Blagnac, exerce exclusivement en droit du travail depuis plus de 13 ans. Après avoir pratiqué à Paris pendant 7 ans, elle met aujourd'hui son expertise au service des salariés et employeurs de la région toulousaine.
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