Rupture d'une période d’essai après une mission en auto-entrepreneur

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Le 13 mai 2025
Rupture d'une période d’essai après une mission en auto-entrepreneur
Rupture de la période d’essai après une mission en auto-entrepreneur : la Cour de cassation rappelle que l’employeur ne peut l’imposer s’il a déjà pu évaluer les compétences du salarié.

Une entreprise peut-elle imposer une période d’essai dans un contrat de travail, après avoir collaboré avec la même personne comme auto-entrepreneur sur un poste identique ?


La Cour de cassation a répondu par la négative, dans un arrêt rendu le 29 avril 2025, en posant un principe fort de protection des salariés : une période d’essai ne peut être valable que si l’employeur n’a pas déjà pu apprécier les compétences du salarié dans un cadre professionnel antérieur, quelle qu’en soit la forme.


Les faits


La salariée avait d’abord travaillé comme agent commercial indépendante (auto-entrepreneure) pour la société, du 2 novembre 2019 au 1er septembre 2020.


À cette date, les parties ont signé un contrat de travail pour les mêmes fonctions, avec une période d’essai de deux mois.

➡️ L’employeur a mis fin à la période d’essai le 13 octobre 2020.
➡️ La salariée a saisi le conseil de prud’hommes, estimant cette rupture injustifiée. Elle invoquait notamment la nullité de la période d’essai, puisque ses compétences avaient déjà été pleinement évaluées durant la collaboration précédente.

Le raisonnement de la Cour de cassation :

Rappel du texte applicable : Article L. 1221-20 du Code du travail :

« La période d'essai permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience (...). »


L'erreur de la cour d'appel :


La cour d’appel de Pau avait rejeté la demande de la salariée, au motif que la période d’essai était valable puisqu’il n’y avait jamais eu de contrat de travail antérieur.


Mais la Cour de cassation rappelle une jurisprudence constante : ce n’est pas la nature du lien contractuel qui importe, mais la réalité de la prestation fournie.

Autrement dit, si l’employeur a déjà eu l’occasion d’apprécier les capacités professionnelles de la personne, la période d’essai n’a plus lieu d’être.

La décision :

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel, considérant que les juges du fond auraient dû rechercher si, lors de la précédente relation en auto-entrepreneuriat, l’employeur n’avait pas déjà pu évaluer les compétences professionnelles de la salariée.


En pratique :

Cet arrêt est un signal clair pour les entreprises :

✅ Si vous avez déjà collaboré avec un travailleur indépendant sur un poste similaire, vous ne pouvez pas imposer une période d’essai sans justification.
✅ À défaut, la rupture pendant l’essai peut être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ouvrant droit à :

  • indemnité de préavis,
  • indemnité de licenciement,
  • dommages et intérêts.

Salariés, faites respecter vos droits : Si vous avez d’abord travaillé pour un employeur en tant qu’auto-entrepreneur, puis que vous avez été embauché en CDI pour des fonctions similaires, l’employeur ne peut pas automatiquement vous imposer une période d’essai.

La Cour de cassation renforce sa jurisprudence en faveur de la protection des salariés.

L’employeur doit être particulièrement vigilant lorsqu’il transforme une relation indépendante en contrat salarié.

La période d’essai n’est pas automatique : elle doit répondre à un véritable besoin d’évaluation, sous peine de sanctions lourdes.

Cass. soc., 29 avril 2025, n° 23-22.389


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